Réflexion symbolique, par G Gandy. À l’image de chaque individu qui cherche, par son juge interne, à s’acheter une vertu, chaque institution utilise un paradigme bien/mal pour justifier son utilité. En effet, lorsqu’on oppose les choses, cela permet de les densifier. Ainsi, on aura plus le sentiment d’exister ! Par exemple, le fait de se présenter sous l’angle du « bien » renforce sa légitimité et l’image que l’on a de soi.
Mais par là, cela favorise le développement de la « diabolisation », qui consiste à diviser, à séparer, à comparer.
De là à nourrir et faire exister ce que l’on prétend combattre, il n’y a qu’un pas !

Exemples collectifs célèbres

Les religions. Dualité à l’œuvre : Dieu/diable

Les religions se placent évidement du côté du « bien ». Mais pour cela, elles combattent le « mal ». Ainsi, petit à petit, le « diable », où le mal en général, confirme l’utilité de la religion.
L’existence du diable légitimise l’église, le baptême, etc.
Sans diable, l’Église n’a plus de rôle. Nous n’avons plus besoin d’elle. Elle a donc besoin du diable, qu’elle va bien sûr chercher à l’extérieur de son institution, pour se prouver et prouver au monde qu’elle est du côté du bien, de dieu. Le diable est son fonds de commerce !
Mais en faisant cela, elle crée le mal, la division, la guerre.
Résultat surprenant : le mal apparaît au final dans sa propre structure (Cf. les actes de pédophilie, les guerres de religion, etc.).
L’accusateur est devenu l’accusé.

La médecine. Dualité à l’œuvre : santé/maladie

Les institutions médicales reposent sur le même paradigme bien/mal que la religion. La maladie représente le mal qu’il faut chasser, exorciser, voire tuer (on veut officiellement éradiquer des maladies).
La maladie est le fonds de commerce de la médecine ! Sans maladie, la médecine n’a pas de légitimité. Elle ne sert plus à rien…
Par conséquent, la médecine et le système de santé créent de plus en plus de maladies. On en découvre sans arrêt, avec des pronostics de plus en plus sévères. La médecine peut alors se présenter comme l’alternative indispensable : elle veut se prouver et prouver au monde qu’elle est du côté de la santé, du bien.
Mais en faisant cela, elle crée la maladie, la mort.
Résultat surprenant : le mal est maintenant créé par la structure médicale elle-même. Les médicaments ont des effets toxiques, les malades sont en danger quand ils se trouvent à l’hôpital (maladies nosocomiales).
Le protecteur de la santé est devenu créateur de maladies !

L’économie. Dualité à l’œuvre : abondance/pénurie

L’économie moderne repose sur le credo qu’il faut de la croissance. Cette croissance est sensée nous apporter le confort dont on a besoin. En fait, la promesse, c’est la suppression de la contrainte, de la limite. L’homme va s’affranchir des limitations matérielles, affectives, psychologiques, etc.
Mais pour nous promettre cette abondance, et cette croissance sans fin, l’économie doit lutter contre la pauvreté !
La pauvreté justifie que l’économie moderne installe partout son système. C’est d’ailleurs ainsi que l’on a proposé aux pays pauvres (en Afrique par exemple) d’abandonner leurs structures pour adopter les nôtres. On connaît le résultat…
En adoptant cette dualité, l’économie crée la pauvreté qu’elle est sensée combattre.
Résultat surprenant : la dette et la pauvreté sont maintenant créées par l’économie elle-même. Plus on taxe les gens pour rembourser la dette, plus la dette augmente. Plus on se restreint, plus on crée de la pénurie. Plus la dette augmente et plus s’éloigne le mirage de « la croissance » et de l’abondance.
Le créateur de confort est devenu créateur de pollutions et de dettes.

L’armée. Dualité à l’œuvre : protection/danger

Les corps de métiers dont la fonction est officiellement de nous protéger – essentiellement l’armée, la police, la gendarmerie, la justice – repose sur la le fait qu’il y a des « méchants », et que donc, il faut s’en prémunir. Car évidement, nous sommes des « gentils » qui voulons sauvegarder nos libertés et nos valeurs.
Les méchants, les terroristes, les agresseurs, les délinquants, justifient l’existence de ces structures. De ce fait, ces structures en ont besoin pour exister.
Ainsi, les armées projettent sans cesse des scénarios d’attaques venant de forces hostiles. Les policiers et les gendarmes voient des dangers internes se profiler, la justice ne sait plus quoi faire des prisonniers toujours plus nombreux, etc.
Les méchants de tous poils sont le fonds de commerce des institutions qui nous protègent. Ils sont de plus en plus présents dans le monde, les médias ne faisant que les pointer, et la délinquance augmente sans cesse, etc. Du coup, des vigiles apparaissent jusque dans nos magasins de chaussures !
Résultat surprenant : les méchants sont maintenant potentiellement nos voisins, nos collègues de travail, nos amis, et même des militaires ou des policiers. Les institutions sensées nous protéger nous surveillent et veulent restreindre nos libertés.
Les protecteurs sont devenus synonymes de privateurs de libertés.

L’éducation. Dualité à l’œuvre : intelligence/bêtise

L’enseignement public ou privé est sensé nous apporter la connaissance. Cela se justifie parce que l’ignorance existe. Du coup, l’éducation nationale a besoin de justifier son existence par toujours plus d’ignorance !
En fait, la bêtise et l’ignorance sont le fonds de commerce de cette institution.
Par conséquent, les systèmes d’enseignement ont une furieuse tendance à créer de la bêtise ! La preuve ? Tous les intervenants s’accordent à dire qu’un bac d’aujourd’hui n’a pas le niveau d’un certificat d’étude des années 50. On parle évidement d’une intelligence pratique et intellectuelle. De plus, les enseignements actuels se mesurent par un papier de fin d’étude souvent basé sur la capacité de l’élève à recracher des connaissances apprises par cœur (cf. les études de médecine par exemple).
Résultat surprenant : l’enseignement crée ainsi de la bêtise, du formatage idiot. Plus le diplôme est élevé, plus l’intelligence risque d’être absente !
Les fabricants d’intelligence sont devenus propagateurs de croyances figées.

Les arts. Dualité à l’œuvre : beau/laid

L’art en général – musique, peinture, sculpture, littérature, cinéma, cuisine, etc – est sensé créer du beau pour nourrir nos âmes. Mais cela se justifie parce que le laid existe.
Donc, le laid est le fonds de commerce des arts. Comme l’art est le domaine de la créativité, il faudrait créer du nouveau qui améliore ce qui existe déjà. Mais ce qui était jugé « beau » est dépassé. Place à « la mode » dans l’air du temps. Actuellement, il faut choquer, donner des messages intellectuels, imposer le « hors la loi », etc.
Résultats surprenant : les arts contemporains ont une fâcheuse tendance à enlaidir nos salles de musées. Nos oreilles souffrent d’entendre les musiques modernes. Nos papilles font la grimace devant les recettes tendances. Nos yeux se détournent devant les vêtements présentés en magasin, etc.
Les créateurs du beau sont devenus les promoteurs du laid.

Et vous, quel est votre fonds de commerce personnel ? Comment justifiez-vous votre existence ?
Veillez à ne pas créer le contraire…

Gilles Gandy

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